L'acouphène - un symptôme souvent ignoré

Gassia Jakmakjian, M. P.A., audiologiste
Manon Trudel, M. Sc. A., audiologiste
Centre d'acouphène et d'hypo-hyperacousie

 

En tant qu'audiologiste, nous devons questionner tous nos clients sur la présence de symptômes otologiques, dont la perte auditive, les vertiges, l'acouphène ainsi que les effets sur leurs vies quotidiennes. Des 78 000 Québécois incommodés par ce symptôme, la majorité d'entre eux enchaîneront en nous disant : « J'ai des acouphènes et mon médecin m'a dit qu'il n'y avait rien à faire. Il faut que je vive avec pour le restant de mes jours. Je suis bouleversé.'»

Certains audiologistes peuvent également avoir tendance à éviter le sujet lors d'explications de résultats et de recommandations avec certaines clientèles comme par exemple les enfants atteints au plan de la santé mentale.

Pourquoi nous sentons-nous mal à l'aise d'aborder ce sujet? Est-ce par manque de temps? Peut-être. Est-ce plutôt parce que nous sommes habitués à avoir un traitement pour tout problème médical et que nous savons qu'aucun traitement chirurgical universel ni de pilule « magique » n'existe encore pour guérir l'acouphène ? Ce que nous oublions, c'est que l'information que l'audiologiste peut transmettre sur l'acouphène est la plupart du temps le meilleur m remède » pouvant rassurer le client. Il suffit de consacrer cinq minutes, au moment de la consultation, afin d'invalider les mythes reliés à l'acouphène : l'acouphène ne détériore pas une perte auditive déjà existante ni ne rend sourd ; il n'augmentera pas nécessairement en intensité ; les prothèses auditives n'amplifient pas la perception de l'acouphène...

Compte tenu de la prévalence de ce symptôme, nous espérons que ce numéro permettra d'informer certains orthophonistes et surtout de rendre les audiologistes plus à l'aise dans leur rôle en tant que professionnels de la santé afin d'expliquer aux clients et à leur entourage que l'acouphène peut être étroitement relié à
certaines pathologies du système auditif, ainsi qu'à l'état de santé en général (diabète, anxiété, etc.). Les audiologistes devraient également informer leurs clients des facteurs pouvant aggraver l'intensité de l'acouphène, tels que l'exposition aux bruits professionnel et personnel incluant la musique écoutée à un volume élevé, ainsi que la consommation accrue de sel, de glutamate monosodique, de caféine incluant certains breuvages énergisants, etc.

Certes, les clients sont d'autant plus rassurés d'apprendre qu'il existe différentes approches thérapeutiques qui peuvent les aider. Nous pouvons mentionner le soulagement généralement ressenti par l'amplification procurée par les prothèses auditives et par l'écoute de la musique et de bruits environnementaux à un volume sécuritaire. Pour les clients nécessitant des interventions plus approfondies, l'audiologiste peut alors référer vers des institutions privées et publiques afin qu'ils puissent considérer les autres approches instrumentales, dont l'utilisation de générateurs de bruit et les masqueurs d'acouphène, ainsi que les différentes approches cognitivo-comportementales.

Bref, ces quelques minutes d'information aident nos clients à surmonter leur état de choc initial, à mieux gérer l'acouphène et à accepter plus rapidement le « deuil du silence ».

 

Fréquences, vol. 20 n° 4, mars 2009 • Les acouphènes